Filage de 6 janvier, par Vanessa Karton

Publié le par Tap Poitiers

Sortir du temps pour quelques instants.

Déjà à l’extérieur, la ville s’est couverte d’un grand manteau blanc,

Plongeant chacun dans un autre rythme, une autre énergie.

La lumière de la nuit est indescriptible, du violet à l’orangé,

Comme si le soleil allait sortir de l’obscurité.

Une panique calme règne et change les habitudes.

Et nous entrons dans la salle, déjà imprégnés d’une ambiance particulière.

 

Le décor trône sur la scène, imposant et distingué.

Il dessine des espaces à deviner, d’autres qui se cachent,

Entre reflets et passages secrets.

Derniers essayages, derniers échauffements, derniers réglages,

On passe des pieds à marcher sur les mains,

Le texte défile murmuré entre les lèvres pour ne plus être oublié,

On entend au loin un « A tout à l’heure ! ».

Et c’est parti pour quelques heures

En compagnie d’Hamlet et d’Ophélie,

De leurs fantômes et de leurs peurs.

La réalité multipliée par les miroirs,

Déformée aussi, vue à travers ses reflets.

Les ombres parlent, les murs dansent

Et les personnages cherchent leur chemin

Dans ce dédale aérien et souterrain.

Les visages blancs dialoguent avec les vivants

Et les ombres des morts.

Les fantômes prennent la parole et disparaissent,

Les vivants conspirent, cherchent la vérité.

Ce jeu devient comme  un cirque antique

Au milieu duquel on a lâché des fauves.

Au dessus, le public assiste au combat.

Les yeux brillent, les visages se tordent puis sourient.

Les bouches crachent des mots, les murmurent,

Les jambes courent, le son rugit.

Le cirque se transforme alors en une grotte sombre

Où les mots s’engouffrent et restent engloutis au fond des âmes.

Le pont suspendu devient radeau de fortune

Et apparaît un castelet où les marionnettes jouent au jeu des grands du monde.

Les couloirs de lumière se croisent et mélangent les destins,

La folie s’immisce dans les recoins,

Les ombres marchent au mur,

Les corps nus s’habillent d’ombres et de lumière

Et sont avalés par l’étoffe qui les enserre.

Les miroirs ont disparu mais les reflets sont toujours là,

Comme des ombres, à chaque pas.

La lumière surgit d’en bas et soulève le sol sous les pieds de tous ces personnages

Il ne reste plus à la terre qu’à engloutir ses morts

 

Et quand la lumière se rallume

Nous restons là, bien vivants,

Plein des reflets de cette histoire incroyable vécue sous nos yeux.

 

 

Vanessa Karton

Petit écrit de ces quelques heures au début la nuit

en compagnie d’Hamlet et toute la compagnie

un 6 janvier de cet an neuf de 2009

 

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